Le double jeu de Sarkozy -

Le double jeu de Sarkozy

Malgré ses efforts, Gay Lib’ peine à faire de Nicolas Sarkozy le champion des droits LGBT. Ecartelé entre une large frange réactionnaire de son parti et quelques individualités progressistes, le candidat UMP a multiplié les maladresses et s’est enferré dans une proposition, l’union civile, qui ne satisfait pas les associations LGBT et se trouve contestée par bon nombre de députés UMP.

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Le double jeu de Sarkozy

Mis en ligne le 25/04/2007

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Par Jean-François Laforgerie

Un salon cossu du Fouquet’s très "moquette épaisse et bibelots rares", c’est dans ce cadre que Gay Lib’ a choisi, le 12 avril, de commémorer, officiellement, son anniversaire (1). Vedettes politiques de la cérémonie : les députés Roselyne Bachelot (catégorie bonne fée progay) et Pierre Lellouche (catégorie repenti penaud). Le député UMP de Paris tient d’ailleurs à revenir sur ses erreurs passées. "J’étais [sur l’homosexualité] à l’âge de la préhistoire, il y a quelques années. J’avais alors des réactions indignes de gens qui réfléchissent." Une façon de rappeler, dans un acte de contrition, que c’est à Gay Lib’ qu’il doit sa "métamorphose." Compagne de longue date de Gay Lib’, Roselyne Bachelot salue le "formidable laboratoire d’idées" qu’est ce mouvement, louant un lieu inédit "de débat et de dialogue" et un "sens de l’ouverture". "C’est une vitrine", lâche même la députée européenne. On ne saurait mieux dire.

Car l’anniversaire n’est pas tout. A neuf jours du premier tour de la présidentielle, l’enjeu est ailleurs pour Gay Lib’. Il consiste, comme d’autres groupes le font pour d’autres candidats, à vendre aux homos les promesses de leur candidat. Dans sa vitrine, Gay Lib’ propose l’union civile et le statut du beau parent, deux promesses de campagne de Nicolas Sarkozy qui doivent beaucoup à Gay Lib’. Il y a fort à faire car le candidat UMP accuse un net retard par rapport à ses principaux challengers avec son refus de prendre en compte, autrement qu’à la marge, la question de l’homoparentalité et son opposition chevillée au corps contre l’adoption par les couples homos ou l’ouverture du mariage. "On dit, à gauche, que notre projet est une amélioration du PaCS. C’est faux, affirme Stéphane Dassé, président de Gay Lib’. Cette union se situe au même niveau que le mariage mais ne se confond pas avec lui." En fait, l’exercice pour Gay Lib’ est périlleux. Il doit séduire les gays en vendant l’idée qu’on pourrait atteindre (ce qui est objectivement faux) l’égalité complète des droits entre homos et hétéros en reconnaissant "l’existence du couple en dehors du projet familial."

L’équation est assez simple pour l’UMP. Le mariage en France, c’est "le couple, le projet familial et le sacrement religieux qui accompagne la cérémonie civile." On n’y touche pas parce que Nicolas Sarkozy ne veut pas. "Nous agissons par pragmatisme" explique-t-on à Gay Lib’ qui voit dans l’adoption de l’union civile "non pas une fin en soi mais une étape". "Je le vois, aussi, comme une étape" explique Roselyne Bachelot qui défend toujours l’ouverture du mariage aux couples de même sexe. "Mais cette avancée ne pourra pas se faire sans une réforme de ce qu’est le mariage aujourd’hui", note la députée. Pour Gay Lib’, l’union proposée n’est rien moins que le "mariage homo néerlandais, ni plus, ni moins." Mais la verra t-on un jour ?

"Nicolas est un homme libre et courageux, affirme Pierre Lellouche. Il fera ce qu’il a dit." Confiante aussi, l’équipe de Gay Lib’ qui estime avoir bien travaillé avec Nicolas Sarkozy ces dernières années. Pourtant, nombre de députés sont hostiles aux propositions de Nicolas Sarkozy et les députés pro gay se comptent sur les doigts d’une main à l’UMP. Alors y aura t-il une majorité pour voter, à l’automne, l’union et le statut du beau parent ? "Nous avons progressé. Il faut voir d’où nous venons, explique Roselyne Bachelot. C’est vrai que les réticences sont énormes mais le travail mené par Gay Lib’ a permis d’apaiser le débat. Nous sommes plusieurs à être favorables à ces mesures. Cela constitue un ferment. Cela ne fait pas une majorité." Alors, comment faire adopter ces textes ? "L’union civile a été votée par 97 % des représentants de l’UMP" explique Gay Lib’ en se voulant rassurant. Cela suffira-t-il à rassurer aux gays ?

(1) La "vraie" fête d’anniversaire s’est déroulée le 13 avril au QG de campagne de Nicolas Sarkozy.

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