Je suis homo, et alors ? sur Arte - Documentaire

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Je suis homo, et alors ? sur Arte

Journaliste, réalisateur, Ted Anspach revient dans un documentaire "Je suis homo, et alors ?", diffusé mardi 13 février à 20h45 sur Arte, sur la question de l’inné et de l’acquis en matière d’homosexualité. Un film, à la fois pédagogique et sidérant qui dévoile, pour la première fois, les techniques de ceux qui prétendent soigner les gays de l’homosexualité. Interview.

E-llico.com / Actus

Je suis homo, et alors ? sur Arte
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Mis en ligne le 14/02/2007

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- Qu’est ce qui vous a le plus surpris au cours de la réalisation de ce film ?

L’ampleur du tabou sur cette question de l’inné et de l’acquis au sein du milieu associatif LGBT. Il a fallu que je montre patte blanche car le seul fait de poser cette question était pris comme une volonté de ma part de remettre en cause tel ou tel comportement. Je ne m’attendais pas à des réactions aussi virulentes. C’est une question qui est très présente chez les homosexuels à titre individuel. Cela fait partie du parcours de réflexion, du cheminement d’auto-acceptation mais sur le plan collectif, c’est devenu, notamment en Europe, un vrai tabou. Cela étant, j’y vois aussi la conséquence de la très forte médicalisation de l’homosexualité à différentes périodes de l’histoire qui a dépossédé les homosexuels de cette question, d’où leur réticence à en parler collectivement et sereinement aujourd’hui. L’autre élément, ce sont les thérapies réparatrices et le fait que ce débat, d’abord américain, arrive désormais en Europe.

- Quelles sont les différences sur cette question de l’inné et de l’acquis entre les Etats-Unis et la France ?

Il y a de grandes différences entre l’Europe et les Etats-Unis. Cette question est l’objet d’un véritable enjeu aux Etats-Unis où des chercheurs, parfois homosexuels eux-mêmes comme Dean Hammer, poursuivent des recherches médicales. Il faut dire que les enquêtes d’opinion indiquent que les Américains sont plus enclins à accepter l’homosexualité si elle est "naturelle" et donc innée que si elle est acquise. D’où les travaux scientifiques, nombreux aux Etats-Unis, qui essaient de valider l’hypothèse d’une homosexualité innée. Cela étant, un chercheur comme Dean Hammer [interrogé dans "Je suis homo, et alors ?] est tout à fait conscient que la preuve d’une homosexualité biologique pourrait ouvrir la porte à des risques de pratique s’apparentant à l’eugénisme. C’est un peu la boîte de pandore. En Europe, la tradition est différente. Nous sommes plutôt dans une culture psy. Il n’y a pas de recherches médicales comme il a pu s’en produire dans le passé, notamment sous le nazisme où Himmler avait décidé d’un "traitement approprié" pour l’homosexualité innée et celle acquise.

- Un des grands temps forts de votre film, c’est lorsque vous montrez les thérapies "réparatrices" aux Etats-Unis et le fait quelles trouvent désormais un prolongement en France. Est-ce, selon vous, très inquiétant ou un simple épiphénomène ?

Je ne crois pas qu’il s’agisse d’un épiphénomène. Aux Etats-Unis, l’association psychiatrique américaine a d’ailleurs mis en garde contre ces thérapies "réparatrices". Les traitements qui ratent ont des conséquences désastreuses pour l’équilibre des gens et notamment des plus jeunes. J’ai, lors de mes recherches, rencontré un homme qui a perdu vingt années de sa vie à nier son homosexualité. Les groupes qui prétendent "soigner" les gays et les lesbiennes recrutent auprès de celles et eux qui ont des pratiques religieuses ou auprès des familles qui ont un de leurs enfants gay ou lesbienne. Ces thérapies sont faites par des gens qui n’ont souvent aucune formation médicale. En France, ces thérapies se font sous couvert d’un discours religieux notamment chez certaines églises évangéliques. Il ne faut pas perdre de vue que la France n’est pas à l’abri d’un virage ultra-conservateur, ni que la question homosexuelle est un des derniers créneaux où les ultras se sentent les coudées franches pour taper sur les autres.

Propos recueillis par Jean-François Laforgerie

>> Un documentaire exemplaire

Deux corps d’hommes qui s’enlacent lors du générique, entrecoupés de plans d’instrumentaux médicaux. Le ton est d’emblée donné à ce film documentaire sur l’origine de l’homosexualité. Car, de fait, cette question, piégée et taboue en Europe, enjeu politique aux Etats-Unis, parle à la fois de personnes qui s’aiment et de haine, de bonheur et de crainte. Les personnes, ce sont les témoins choisis par le réalisateur Ted Anspach aux parcours variés, aux aspirations diverses dont le principal point commun est d’avoir été confronté à une question : pourquoi sont-ils homosexuels ? La haine, c’est celle de politiques éructant à l’Assemblée Nationale. La peur, c’est celle qu’on ressent devant ces anciens gays qui prétendent, avec l’appui des milieux ultra conservateurs, corriger l’homosexualité. Ni militant, ni
didactique, "Je suis homo, et alors ?" montre bien la diversité d’approche qui existe en Europe et aux Etats-Unis sur les origines de l’homosexualité. Il marque surtout par la folie de discours religieux américains, repris par certains groupes religieux et politiques hexagonaux, qui visent rien moins qu’à "guérir les homosexuels".

"Je suis homo, et alors ?", un film de Ted Anspach, produit par Doc en stock, mardi 13 février à 20 h 45 sur Arte, soirée Thema.

>> Vanneste, encore et encore

Interrogé dans le cadre du documentaire, Christian Vanneste, député CNI/UMP, affirme qu’il faut réagir "le plus vite possible chez l’enfant lorsqu’on perçoit ce genre d’évolution [l’homosexualité] afin de proposer une thérapeutique, un traitement, un accompagnement." Poursuivant son propos, Christian Vanneste indique qu’une "société avec 50 % d’homosexuels et 50 % d’hétérosexuels" serait "dramatique. Ce serait une menace pour notre avenir."

Mis en ligne le 12/02/07

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