Par Jean-François Laforgerie

"Le propre d’une démocratie moderne, c’est la découverte permanente de nouvelles injustices et la conquête incessante de nouvelles libertés." Les jolis mots de Nicolas Sarkozy (1) sonnent étonnamment faux dès lors qu’on les applique à la façon dont le candidat UMP aborde désormais les droits LGBT. Il n’est d’ailleurs pas le seul dans ce cas puisque François Bayrou est, à d’infimes nuances près, sur la même ligne. La difficulté pour les deux candidats de droite est de convaincre qu’ils sont en faveur d’une "égalité" des droits entre homos ou hétéros tout en écartant les mesures à même de permettre enfin d’atteindre cet objectif. C’est ainsi que tous deux défendent une union civile (qui a copié sur l’autre ?) qui instaurerait certains des droits de l’actuel mariage hétéro tout en privant le droit aux parents de même sexe de faire famille. Bref, une position d’équilibriste qui, certes, pointe une relative évolution : la droite ne serait plus aussi homophobe qu’avant, mais qui peut aussi tromper son monde.

"Je trouve grave et dangereux de laisser croire que le projet politique de la droite est le même que celui de la gauche, explique François Vauglin, délégué national du PS aux questions LGBT. Concernant les questions LGBT, que gagnerions-nous avec la droite ? Le droit de quémander qu’on ne touche pas aux libertés chèrement acquises ? De nouvelles luttes pour que le PaCS ne soit pas détricoté ou abrogé comme ils l’ont déjà annoncé ? Savoir que nos partenaires de PaCS sans papiers seront expulsés ? N’oublions pas que c’est Nicolas Sarkozy qui a osé pour la première fois défaire les couples que la République reconnaît en expulsant des partenaires pacsés sans papiers. Compte-t-il s’arrêter ? L’histoire l’a amplement démontré : tous les droits essentiels conquis pour le respect des personnes LGBT ont été obtenus par des gouvernements de gauche."

Ce n’est évidemment pas l’avis de Gay Lib. "Depuis 2002, et souvent avec notre implication active, notre pays a connu de nouvelles garanties et des droits supplémentaires pour les personnes LGBT (aggravation des sanctions pénales pour les auteurs d’agressions homophobes, suppression par Nicolas Sarkozy du délai de trois ans pour la déclaration commune de revenus pour les pacsés, pénalisation des injures et diffamations homophobes, améliorations importantes du PaCS) indique Stéphane Dassé, président de Gay Lib’. Aujourd’hui, presque tous les candidats à l’élection présidentielle expriment des propositions pour les personnes LGBT et Nicolas Sarkozy est loin d’être le moins respectueux ni le moins disant sur l’ensemble de nos sujets."
Reste qu’il faut bien noter qu’il y a encore du flou et des incertitudes dans les projets à droite. Là où le PS a déjà fait des propositions de loi, le candidat UDF semble peu préparé (voir encart p. X) et Nicolas Sarkozy n’a pas encore tranché définitivement sur la nature de son projet (voir encart page X). Et puis une question demeure (voir ci-contre). En cas de victoire, les deux candidats de droite auront-ils les moyens politiques d’appliquer leurs promesses ?

(1) "Une démocratie irréprochable", tribune dans "Le Monde", mars 2007.