Et pourtant jamais cet enjeu politique majeur n'a quitté notre esprit. Comment en effet déconnecter ce combat pour notre liberté et pour que justice nous soit rendue du débat et du choix qui vont se dénouer dimanche?

Illico a entrepris un travail très approfondi d'information et d'explication des projets des candidats en présence dans le débat. Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy - qui se trouvent être les deux finalistes de l'élection, ont fait l'objet de très nombreux articles, dossiers et commentaires parce que les propositions qu'ils portent s'opposent, à l'image de leur projet politique tout entier.

Chacun de nos lecteurs sait désormais dans le détail ce qui sépare le mariage gay de l'union civile. Avec l'engagement soucieux des droits LGBT qui a toujours constitué sa ligne éditoriale, Illico a déjà dit l'avantage historique que l'égalité effective portée par la candidate de gauche représente pour les gays et les lesbiennes comme il a critiqué le statut spécifique aux couples homos préconisé par celui de la droite.

Comme nous, la quasi-totalité des organisations homosexuelles ou de lutte contre le sida ont fait le même choix. C'est bien là le signe que pour la première fois depuis la création du PaCS un enjeu très concret et très symbolique -en même temps pour les homosexuels et pour tous ceux que le principe d'égalité anime- se joue à l'occasion de ce scrutin.

Si Ségolène Royal est élue, la France et l'ensemble de ses citoyens bénéficieront enfin d'une égalité de droits à l'exemple de la plupart des grandes démocraties européennes voisines. C'est un engagement auquel elle a souscrit et qu'elle a défendu; un projet porté aussi par toute la gauche qui la soutient. A l'inverse, Nicolas Sarkozy a tâtonné avant d'élaborer une construction incertaine qui écarte les homosexuels du mariage et de l'adoption. Il a bâti ce projet dans la mesure où il était le seul à même de pouvoir éventuellement rassembler une majorité parmi les parlementaires qui le soutiennent.

Pendant les cinq années à venir, le degré de progression des droits, mais aussi des conditions d'existence des millions d'homosexuels et de lesbiennes français vont être conditionnés par ce choix emblématique. Non seulement, la question de l'ouverture du mariage et de la reconnaissance de l'homoparentalité découleront automatiquement du choix de dimanche, mais au-delà, la lutte contre l'homophobie, sa prévention à l'école, dans les services publiques ou l'entreprise dépendront aussi du dynamisme impulsé par le ou la futur président(e) de la République.

A partir de ce choix essentiel progresseront aussi ou régresseront des libertés fondamentales comme l'exercice du droit d'association, de manifestation et d'expression aussi, comme celui qu'Illico s'est toujours battu pour faire respecter. En particulier au cours de ces derniers jours qui nous ont tristement rappelé que ces libertés sont fragiles, qu'elles peuvent être menacées. Que celles qui touchent les minorités sexuelles en particulier -patiemment et durement conquises depuis 1968- peuvent être remises en cause comme il y a vingt, trente ou quarante ans et toujours par ceux pour qui l'homosexualité est inexorablement assimilée à un danger pour la jeunesse.

Tous ceux pour qui la liberté et l'égalité constituent des principes ou des valeurs primordiales puiseront dans cet épisode le sentiment que les apparences d'une société plus tolérante envers les homosexuels peuvent masquer des tentations homophobes dont on aurait pu se croire à l'abri. Et ils auront le souci de tenter de s'en prémunir en utilisant leur bulletin de vote le 6 mai pour la candidate qui n'a pas craint de porter l'une des plus belles et des plus justes revendications de liberté homosexuelle dans son combat.

Lire notre édition spéciale : Présidentielle 2007.

Mis en ligne le 04/05/07