La diffusion sur France 2 du film "Un amour à taire" a suscité de nombreuses réactions et un regain d’intérêt pour la déportation homosexuelle. A l’occasion de la Journée du Souvenir de la déportation, le 24 avril, "Illico" a interrogé le ministre des Anciens combattants sur cet enjeu de mémoire majeur.

Par Jean-François Laforgerie

L’émotion. L’émotion d’abord, l’émotion surtout. C’est elle qui a marqué les nombreuses réactions qu’a suscité la diffusion d’"Un amour à taire" sur France 2 le 7 mars. "Les réactions ont été extrêmement positives, constate Christian Faure, réalisateur du film, mais surtout empruntes d’émotion. Les auditeurs d’Europe 1 et de RTL étaient manifestement émus en évoquant le film. Sans doute parce que les spectateurs ne sont plus habitués à voir les héros mourir, sans doute parce que certaines scènes sont très dures sans être pour autant complaisantes mais surtout parce que le scénario, excellent, a permis à beaucoup de s’identifier, d’avoir le sentiment d’être très proches des héros".

Emu, Andreas Pretzer, un des meilleurs spécialistes européens de la déportation, explique l’avoir été aussi parce que "l’histoire sonne juste et que l’on se sent proche de ceux qui la vivent". Même sentiment pour Magali Boumaza, sociologue et spécialiste de la mémoire de la déportation des homosexuels : "J’ai moi aussi été très émue et notamment par l’évocation des tortures, de la lobotomie, de cette période où l’on se donne le droit de torturer parce qu’on ne voit plus l’autre comme un homme mais comme un sous-homme. Cela m’a marquée". "Ce film a été une révélation, explique Michel Chomorat, organisateur des Assises de la mémoire gay et lesbienne de Lyon (1). C’est tout à l’honneur d’une chaîne publique de l’avoir diffusé en prime time devant six millions de téléspectateurs. Il y aura incontestablement un avant et un après "Un amour à taire". C’est historique."(2)

Les réactions montrent bien que cette page d’histoire a été une révélation pour beaucoup. "A l’évidence, le film a bien été une révélation. Beaucoup, jeunes ou vieux, homos ou pas, ignoraient cette page de notre histoire, explique Pascal Fontanille, producteur et co-scénariste du film. Il n’y a quasiment pas eu de réactions négatives parce que nous avons été justes sur le plan historique : le film ne montre pas des rafles d’homosexuels en plein Paris, il ne fait pas l’amalgame avec la Shoah. Tout au contraire, nous avons eu des réactions très belles, très émouvantes de gens qui retrouvaient dans notre film la tension de l’époque, qui s’appropriaient le film même."

"C’est vrai que ce film a été une révélation pour beaucoup d’homosexuels, analyse Christian Faure. Notamment avec la découverte d’expériences conduites pour "guérir" les homosexuels. Je pense que le film va laisser des traces. Comme j’ai toujours trouvé le scénario excellent, je n’avais pas vraiment d’inquiétude quant aux réactions que le film susciterait. En fait, je craignais plutôt que les gens n’aient pas une envie folle de voir le film, de voir encore un film sur la déportation, sur cette période, mais cela n’a pas été le cas et les indices Médiamétrie indiquent que 600 000 foyers ont enregistré le film. Ce qui est sûr, c’est que je ne pensais pas que cela irait aussi loin. Je m’étais dit : si les spectateurs, après avoir vu cette histoire, trouvent dégueulasse que Sarah ne puisse honorer la mémoire de son ami homosexuel déporté, le pari était réussi. Je crois que c’est le cas".

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ACTUALITÉ DE LA DÉPORTATION HOMO
LES RÉACTIONS

(1) La dernière édition était consacrée à la déportation des homosexuels, des actes seront publiés dans quelques mois.

(2) "Lyon Capitale", 23 mars 2005.